Par Stefano Lupieri le 04.02.2022
Longtemps considérés comme pathologiques, les états modifiés de conscience provoqués par la transe connaissent un regain d’intérêt dans la communauté scientifique pour leurs vertus thérapeutiques. Qu’ils soient induits par des substances psychédéliques ou de nouvelles techniques issues du chamanisme nous permettant d’accéder à une conscience élargie.
« L’état de transe me plonge dans une sensation de bonheur intense. Je me retrouve souvent parachutée dans des paysages naturels magnifiques. Avec une impression d’apesanteur. Toutes mes perceptions sont amplifiées. Dans une sorte d’extase des sens. » Valérie Picard s’adonne à cette pratique deux à trois fois par semaine. « Elle m’aide à me ressourcer », dit-elle. Médecin psychiatre à la clinique Belmont de Genève, elle n’a pourtant pas, a priori, le profil pour s’intéresser à ce type de techniques, encore controversées, d’exploration d’autres états de conscience que ceux classiquement répertoriés.
Loin d’être une chamane, elle a appris à induire la transe lors d’une formation organisée dans son établissement hospitalier. « En Suisse, on est beaucoup plus ouvert à des approches alternatives de soins », précise-t-elle. Ce qui ne l’a pas empêchée d’être ébranlée lors de son premier essai. « Pour un médecin rationnel formaté aux neurosciences et à la psycho-pharmacologie, expérimenter ce type d’état hallucinatoire de dépersonnalisation, dont on pourrait penser qu’ils relèvent d’épisodes psychotiques, est pour le moins perturbant, reconnaît-elle. Ce qui m’a rassurée et convaincue de continuer, c’est de constater que je pouvais en sortir à tout moment et que je gardais donc le contrôle. »
Happée par le tambour chamanique
L’approche très rigoureuse de Corine Sombrun, l’animatrice de cette formation, a aussi beaucoup joué pour crédibiliser à ses yeux cette technique. Si elle refuse le qualificatif de « chamane », que d’autres Occidentaux s’approprient à la va-vite, cette ex-compositrice et reporter âgée de 61 ans a été bel et bien formée dans la plus pure tradition par une chamane de l’ethnie des Tsaatans, dans le nord de la Mongolie, aux confins de la Sibérie. L’histoire de son initiation a d’ailleurs été racontée par la réalisatrice Fabienne Berthaud dans le film « Un monde plus grand », sorti en 2019, avec dans son rôle Cécile de France.
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